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même, il fut assuré par son cousin le duc d'Elbeuf que le lendemain on entreprendroit sur sa vie. A qui il ré­pondit : « Je voy bien que vous avez regardé votre al­ée manach, car tous les almanachs de cette année sont « farcis de telles menaces. »
Le vendredy 2 3, le Roy manda de bon matin au duc et au cardinal de Guise qu'ils vinssent au conseil, et qu'il avoit à leur communiquer affaires d'importance. Entrans au château, ils trouverent les gardes renfor­cées, qui prièrent le duc de les faire payer; mais d'une maniere moins respectueuse qu'à l'ordinaire. A quoy ne prenant aucunement garde, ils passèrent outre. Ce matin il avoit reçu de divers endroits neuf avertisse-mens, et dit tout haut en mettant le neuvieme billet en sa pochette : « Voilà le neuvième d'aujourd'hui. » Etant entré au conseil, il saigna du nez deux ou trois gouttes, et vit-on un œil pleurer; après il eut mal au cœur, et un affoiblissement qu'on attribua plutôt à une débauche qu'à un pressentiment. Sur ce, le Roy le manda par Revol, qui le trouva comme il resserroit dans son dra­geoir quelques raisins et prunes apportées pour son mal de cœur. Gomme il entroit en la chambre du Roy, nn garde lui marcha sur le pied; et cependant continua de marcher vers le cabinet, et soudain, par dix ou douze des quarante-cinq, fut saisi aux bras et aux jam­bes, et par eux massacré, jettant entr'autres cris et paroles celles - cy, qui furent clairement entendues: « Mon Dieu, je suis mort, ayez pitié de moi! ce sont « mes péchés qui en sont cause. » Sur ce pauvre corps fut jetté un méchant tapis ; et , laissé quelque tems exposé aux mocqueries des courtisans, qui .'appelloient le beau roy de Paris, nom que lui avoit donné Sa Ma-
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